Nouveau départ

Avant de quitter les États-Unis pour venir en France, les gens avec qui je partageais mes projets s’extasiaient : « You are going back home! » Moi, je restais perplexe. Après 17 ans aux States, « Back Home » existe-t-il encore ?

Retour en France après 17 ans aux Etats-Unis. Nouveau départ. Arrivée sur Genève.

Arrivée sur Genève, une nouvelle vie s’annonce.

La vérité c’est que je suis revenue dans ma mère patrie avec l’impression excitante d’être une exploratrice.
Je redécouvre avec nostalgie et curiosité une terre familière et différente à la fois. D’abord, nous avons décidé d’emménager en Savoie, en terrain quasi inconnu, si ce n’est un voyage d’un mois l’année précédente. Ensuite, j’ai laissé derrière moi le mari et les chats, mais aussi un métier stable et généreusement rémunéré, une maison cossue, spacieuse et confortable et une routine bien huilée.

Retour en France après 17 ans aux Etats-Unis. Nouveau départ. Premier stop : Le Bourget-du-Lac..

Le Bourget-du-Lac.

Retour en France après 17 ans aux Etats-Unis. Nouveau départ. Le plaisir retrouvé de la librairie française.

La librairie française, de nouveau.

J’ai donc préparé le départ et nous sommes parties, les filles et moi, en ce début de juillet, avec cinq bagages contenant nos trésors les plus chers. Je passe sur un début de voyage éprouvant, lorsqu’au départ de Denver il a fallu caser nos valises gigantesques dans un Uber dérouté (XL pourtant), en direction de l’aéroport. 20 heures plus tard, nous voilà dans un Airbnb à Bourget-du-Lac. Case zéro du plateau. Je suis sans emploi, logement, voiture et téléphone. 

Dès notre arrivée, nous avons commencé à explorer et tracer nos pas sur les berges des lacs de Savoie.  Des milliers de questions se bousculaient dans ma tête dans un concert affolé de doutes et d’espoirs. Je crois que rarement de ma vie je n’ai été aussi anxieuse.

Je lance les dés. Premiers jours : double zéro. Lorsque je me suis rendue chez l’un des opérateurs téléphoniques les plus connus nationalement – avec un O majuscule s’il vous plaît – le personnel m'a refusé une ligne car je ne pouvais ni lui fournir une facture EDF à mon nom ni la carte d’identité de ma mère qui ne se doutait de rien, dans sa maison de retraites à Paris. Le lendemain, j’étais plus chanceuse. Ou tenace. Et je suis parvenue à braver les absurdes complexités administratives. J’ai ouvert (chez la concurrence) trois lignes téléphoniques d’un coup et j'ai acheté une petite Mazda noire d'occasion, le tout sans adresse fixe. 

Dans un élan d’énergie inattendue, j’ai également inscrit les filles aux activités ados proposées par la Maison des Jeunes de Chambéry, et dont les tarifs si bas comparés à ceux américains, m’ont propulsée dans un état de joie indicible. Il faut largement diviser par cinq pour savoir de quoi on parle.

Nous avons aussi eu quelques fous rires. Le coup du bonnet de bains obligatoire pour profiter des jets de la piscine municipale restera dans nos annales. Comme dit ma fille, on ressemblait à des œufs version touristes américaines dans nos bikinis trop échancrés.

Après cette première semaine jetlaguée, riche en évènements et ponctuée de multiples courses chez Carrefour, je me sens encore si fragile et ivre d’émotions contradictoires. Recommencer à zéro, c’est bousculer le quotidien pour pousser la porte sur un territoire vierge et presqu’inconnu, qu’il faut repeupler, tout doucement, d’habitudes, d’objets, de repères et de rencontres.  

Home n’existe pas encore. Ni là-bas, où nous avons laissé une maison que l’on mettra en vente un jour ou l’autre, ni ici, où nous sillonnons pour le moment le 73 000 d’un Airbnb à un autre.

Il y a des moments d’excitation qui me ramènent des années en arrière. Les éclairs au café et les Gervita crémeux fondant en bouche, le rayon des romans à la librairie du quartier, la bouteille de rosé fruité à moins de dix euros, la bande son FM quand j’allume le moteur de la voiture, la cloche qui sonne les douze coups de midi… Mais je me retrouve aussi à la tête d’un blog de création sans mes outils chéris et je me sens nue comme un ver : ma machine à coudre, mes colles, mes peintures, mes coupons de tissu, mes bouts de dentelle, de laine et de rubans me font cruellement défaut, presqu’autant que les ronronnements langoureux de mes chats allongés près de ma nuque. 

Mon prochain rendez-vous est donc déjà fixé au rayon outillage de Castorama. Et d’ailleurs, comment ils sont les magasins de bricolage et de loisirs créatifs par ici ?

Retour en France après 17 ans aux Etats-Unis. Nouveau départ. La MJC.

MJC, Maison des Jeunes de Chambéry.

Retour en France après 17 ans aux Etats-Unis. Nouveau départ. Des fleurs et des vieilles pierres.

Le Bourget-du-Lac, Prieuré.

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